26 juin 2025

25 ans de Généalogie 33

L'association Généalogie 33 vient de souffler ses 25 bougies, un moment fort que nous avons partagé le lundi 16 juin 2025 en présence des adhérents et des amis de la généalogie.

Nous vous proposons un retour en images sur cette soirée conviviale qui s'est déroulée à "La Bergerie" sur le domaine de Villepreux à Saint Aubin de Médoc


Les préparatifs


Dans la joie et la bonne humeur

Belphégor s'est invité 😄


Les coulisses en cuisine


Remerciements à tous et à toutes pour vos plats délicieux à faire pâlir certaines émissions culinaires 😋



Le diaporama retraçant les 25 ans de Généalogie 33


Moment d'émotion pour les plus anciens de l'association ainsi que pour "les nouvelles recrues" et les amis qui ont découvert la naissance, le travail, la détermination, le partage et l'évolution de ce petit groupe de passionnés de généalogie des années 2000 jusqu'à aujourd'hui.
Un quart de siècle riche en travaux et événements.

Essais sons avec Yves Huez et James Colombel

Installation et derniers papotages avant projection


Francis CHASSAGNAC - Président de la Fédération Française de Généalogie (à gauche)
et James COLOMBEL - Président de Généalogie 33 (à droite)


Présentation des ouvrages et des travaux réalisés par l'association

Au fil des tables et des gourmandises









Petit cours de paléographie chocolatée avec Sandrine


La dream team


La promo 2024 - 2025


Nous avons passé un très beau moment,
merci à vous pour votre présence et votre participation à l'organisation de cet événement 
Vivement 2030...

Sources : photos collégiales à Généalogie 33 + Eléonore du service communication de la mairie de Saint Aubin de Médoc

05 juin 2025

Paléographie chez Généalogie 33

Lundi dernier nous avons suivi notre dernier cours d'initiation à la paléographie de la saison.

Nous avons débuté l'année par un acte notarié datant de 1755 :


et avons clôturé nos cours par un "arrest contre les bouhemiens" de 1618 :


La paléographie est une science qui étudie les écritures anciennes. Le mot paléographie vient du grec "Palaios" qui signifie ancien et "graphein" qui signifie écrire. La généalogie et la paléographie sont étroitement liées car la lecture des lettres personnelles, des actes de naissance, de mariage, de décès, notariaux et juridiques nous permet de retracer l'histoire familiale de nos aïeux et de leur époque.

Nous observons plusieurs styles d'écriture au fil du temps dont l'écriture gothique qui semble plus complexe à déchiffrer avec ses formes angulaires et ses ligatures entre les lettres. Des obstacles peuvent interférer dans notre compréhension d'un écrit : les expressions régionales, le vocabulaire spécifique à certains métiers, l'orthographe souvent phonétique, les noms propres, les abréviations, le manque de ponctuation et le papier qui peut être détérioré sans oublier les "fameuses" lignes d'écritures qui le traversent parfois.

Il est donc important de s'armer de patience et de ré - apprendre à lire lettre par lettre, mot par mot et ligne par ligne chaque texte. La paléographie s'appuyant sur la transcription et non sur la traduction, il nous faut également respecter les fautes d'orthographe, le défaut de ponctuation ainsi que le "mélange" de lettres majuscules et minuscules. Si il nous manque un mot, ce n'est pas grave, nous mettons un "?" et nous y reviendrons plus tard ou demanderons de l'aide.

Personnellement, je relis les textes sur plusieurs jours et je trouve toujours de nouveaux mots sans oublier mes outils secrets : crayon à papier et gomme 😉


Notre année d'initiation à la paléographie, dispensée par le Président de l'association Généalogie 33, a été riche en apprentissage et il semble que le Professeur soit fier de ses élèves. Vivement la rentrée...

21 mai 2025

Les filles de Camille


Le lundi 12 mai 2025, Patricia Ghilardi, présidente de l'association "Les filles de Camille", est venue nous présenter le documentaire "Camille et ses filles" réalisé par Christine Salavert - Grizet. Elle est accompagnée de trois pensionnaires du Centre Espoir dans les années 1960 : Eliane, Michèle et Mireille.

Le documentaire retrace une partie de l'enfance de Claude, Jeannine et Monique (maman de Patricia), leur arrivée avec leur enfant au Centre Espoir situé au Château des Arts pour y suivre une formation et en ressortir diplômées.

Une cinquantaine de personnes présentes pour la projection suivie d'un débat

Le Centre Espoir et le Château des Arts

Le Centre Espoir, créé par Madame Chaumet, inspectrice de l'Education Nationale en 1944, est le seul établissement public en France à proposer une formation aux mères célibataires mineures de moins de vingt ans. Elèves et bébés y sont boursiers, ce qui est assez mal vu à l'époque par le rectorat car cela coûte cher à l'Education Nationale. Le reliquat, après paiement des pensions, sert à constituer un trousseau qui sera offert à la mère à son départ de l'établissement : une valise contenant draps, couvertures, vêtements pour l'enfant et la maman.

Localisé initialement dans plusieurs châteaux successifs entre 1944 et 1956, le Centre Espoir est accueilli au château des Arts de Talence à partir de l'été 1956.

Le Château des Arts (photo de P. Ghilardi)

Les mères et les enfants vivaient dans le Château : le rez-de-chaussée et le premier étage étaient constitués des dortoirs pour les mamans, les femmes enceintes et les enfants, d'une salle de bains et d'une chambre pour l'infirmière. Au sous-sol se trouvaient la cuisine, le réfectoire, une buanderie et une salle d'apprentissage pour les arts ménagers. Les cours se déroulaient dans des préfabriqués installés dans le parc. La directrice et l'économe disposaient d'un logement à l'entrée du parc.

Une journée type : la maman se lève, se prépare, fait son lit et descend déjeuner à la cuisine. Puis elle monte chercher son enfant, le fait manger, l'habille et le place dans le parc pendant qu'elle participe aux tâches ménagères avant d'aller en cours. Les enfants sont gardés par des puéricultrices et une infirmière en attendant le retour de leur mère.

L'escalier du Château des Arts
Photo de P. Ghilardi

Des jeunes filles enceintes pouvaient démarrer leur scolarité au Centre Espoir du château des Arts avant de rejoindre la maison maternelle de Cholet en fin de grossesse, et ensuite partir accoucher à la maternité de Pellegrin. A la sortie de la maternité de Pellegrin, elles revenaient à la maison maternelle de Talence jusqu'à ce que leur enfant soit âgé de neuf mois. Pendant cette période, elles pouvaient venir suivre leurs cours au Centre en s'y rendant à pieds. A partir des neufs mois de l'enfant, elles revenaient au Château des Arts avec leur bébé.

Pour celles qui arrivaient à la maison maternelle après avoir accouché en dehors de la maternité de Pellegrin, une quarantaine de vingt et un jours était requise pour la mère et son enfant ; par peur des maladies diverses et vénériennes semble-t-il. Eliane se souvient de cette mise en quarantaine difficile passée enfermée dans une chambre avec son fils sans contact extérieur, elle avait quinze ans et demi.

Il a été dénombré quelques rares cas de jeunes filles non revenues au centre après un accouchement sous x.

Quelques dates clefs :

1944 - création du Centre Espoir qui accueille quelques 30 enfants et leur mère

1956 -  création du collège au Château des Arts proposant rattrapage scolaire et quatre CAP : secrétariat / comptabilité / couture / employée de collectivité

1972 - mise en place de 26 chambres individuelles pour mère/enfant 

1976 - création du lycée professionnel

Puis le nombre des mères célibataires diminue au centre. Il semble probable que ce fait soit dû aux moyens de contraception développés ainsi qu'aux allocations allouées aux "mamans solos".

Le documentaire "Camille et ses filles" réalisé par Christine Salavert - Grizet : Claude, Jeannine et Monique

nous dévoile des secrets, des non-dits, des agressions physiques et verbales, des lacunes éducatives et affectueuses mais également des actes de résilience et de compréhension au sein de certaines familles.

Le documentaire "Camille et ses filles"

En 1960, Monique, seize ans et sa fille Patricia alors âgée de onze mois intègrent le Centre Espoir. Lorsque la mère de Monique apprend que sa fille est enceinte, elle lui impose d'aller dire à la directrice de son collège technique qu'elle est malade et ne peut pas poursuivre ses études. Durant des années, Monique aura honte de cette grossesse précoce et n'osera pas aborder le sujet avec sa fille.

Monique et sa fille Patricia au Château des Arts en 1960
Photo de P. Ghilardi

En bas âge Claude perd sa mère. Son père, incapable de l'élever, confie la petite fille à de la famille en région parisienne. Puis à cinq ans elle est placée dans un orphelinat jusqu'à l'obtention de son certificat d'études l'année de ses quinze ans. Claude est enceinte à quinze ans et demi. A l'annonce de sa grossesse, sa belle-mère exige qu'elle quitte la maison. Claude part donc du sud - est de la France pour Talence en passant par Paris où elle accouche.

Jeannine est surprise par l'arrivée de ses règles à dix ans. Elle en parle à sa mère qui en réponse lui demande de réciter "Je vous salue Marie". Jeannine s'exécute jusqu' à la phrase "et Jésus, le fruit de vos entrailles" sa mère lui coupe la parole et lui demande si elle a compris.

Peut - on parler d'éducation sexuelle ? Si oui elle semble rudimentaire et incompréhensible. Le sujet des filles - mères n'aurait sans doute pas été tabou si celui de l'éducation sexuelle ne l'avait pas été également.

A onze ans, lors d'une sortie avec sa soeur et son ami, elle se retrouve seule et subit les attouchements sexuels d'un inconnu. Alors qu'elle devait entrer en classe de 4ème, elle constate qu'elle est enceinte. Lorsque sa mère l'apprend, elle cache la vérité à son mari par peur d'une réaction violente de ce dernier et préfère enjoliver "l'histoire interdite" en lui annonçant que leur fille part faire ses études à Bordeaux. Un long périple vers l'inconnu va débuter pour une jeune fille qui se souvient encore des cris des sept femmes qui ont accouché avant elle ; "on ne peut pas guérir, on fait avec".

Il y a aussi le souvenir de cette fillette de treize ans enceinte des suites d'un inceste.

Les témoignages nous dressent les portraits de jeunes mères tout juste sorties de l'enfance et qui semblent de pas avoir profité sereinement de l'insouciance de leurs années de pré - adolescence. Les yeux malicieux, Claude avoue cependant avoir fugué une journée du Château avec deux amies pour faire une sortie cinéma avec des garçons. Elles se souviennent toutes de cette fenêtre du Château des Arts depuis laquelle elles apercevaient des garçons venus les saluer. Des sourires sur leur visage en évoquant ce souvenir et puis cette phrase "nous faisions attention, nous avions toutes un enfant".

Elles ont eu le courage et la force de surmonter cette épreuve d'abandon familial, de honte ou de déshonneur pour certaines, d'éloignement de la structure familiale pour d'autres en étant accueillies, dans les années 1960, au Centre Espoir par une Mademoiselle Bru qui dirigeait l'établissement d'une main de fer dans un gant de velours. Elle gérait le centre et "ses filles" avec l'autorité requise tout en restant juste et humaine. Une "mère" de substitution pour Eliane et d'autres pensionnaires.

Le débat : Eliane, Michèle, Mireille et Patricia


Eliane, Mireille et Michèle


Eliane a obtenu son CAP d'employée de bureau après avoir débuté des études de couture. C'est Mademoiselle Bru qui lui a vivement suggéré de changer d'orientation et elle a eu raison. Après avoir travaillé dans un centre pour personnes handicapées, Eliane a fait carrière dans un grand groupe immobilier.

Michèle nous raconte son arrivée au Château des Arts en 1960 avec son enfant, elle est âgée de dix neuf ans. Diplôme acquis elle passe un concours pour être secrétaire dans un institut de recherches. Lors de l'entretien d'embauche le directeur lui suggère de ne pas parler de son enfant afin de ne pas poser de "problème" dans son travail. Son enfant sera passé sous silence pendant quelques années jusqu'au jour où des collègues la surprennent en sa compagnie sans que cela pose le "fameux" problème initialement invoqué.

Mireille est arrivée enceinte et a accouché à Cholet avant d'intégrer le Château des Arts en 1962 avec son bébé de neuf mois. Elle est entourée et soutenue par sa famille contrairement à d'autres jeunes filles. Son séjour au Centre Espoir s'est déroulé en alternance entre son statut de pensionnaire et les visites dans sa famille "c'était le seul établissement qui assurait une éducation jusqu'à l'obtention d'un diplôme" pour les mères célibataires.

Patricia est la fille de Monique, elle a passé ses premières années au Centre Espoir, a été élevée par un beau-père qui l'a toujours considérée comme sa fille et qu'elle appelait papa. A neuf ans elle entend une phrase jetée en l'air par une personne de la famille et apprend qu'elle n'est pas la fille biologique de son "papa". Sa mère ne souhaite pas évoquer le sujet mais, à l'adolescence, Patricia persiste et retrouve les traces, l'adresse de son père biologique. C'est à trente ans qu'elle décide de le rencontrer, de faire sa connaissance. Des retrouvailles qui vont perdurer.

Patricia Ghilardi

Claude, Eliane, Jeannine, Michèle, Monique, Patricia, vous nous avez ému, vos parcours différents et chaotiques nous ont interpelé sur les conditions des mères célibataires dans les années 1960 et bien avant. Le Centre Espoir porte bien son nom et a tenu ses engagements en assurant à la fois votre éducation et celle de votre enfant. Le Château des Arts n'est pas en reste puisqu'il a fait de vous les artistes de vos vie. Merci Mesdames pour vos témoignages et soyez fières des personnes que vous êtes devenues.

Grille du Château des Arts
Photo de P. Ghilardi

Le Château des Arts n'a pas fini de nous raconter son histoire. Témoin du mariage de François Mauriac et de Jeanne Lafon en 1913, puis foyer des mères célibataires à partir de 1956, il a perduré dans son statut de lieu d'éducation jusqu'en 2002, date de sa fermeture. Racheté par la mairie de Talence en 2018 et après des travaux de réaménagements, il ré - ouvrira ses portes fin 2026 en conservatoire municipal de musique, de danses et d'arts plastiques.

L'association "Les filles de Camille"


présidée par Madame Patricia GHILARDI, l'association a pour mission de réunir les pensionnaires (mères et enfants) et professionnelles du Centre Espoir, situé au 109 rue Camille Pelletan à Talence, dans la période de 1956 à 1976 : poursuivre et communiquer sur les recherches historiques concernant cette période.

Si vous avez des informations ou souhaitez des renseignements, vous pouvez prendre contact avec l'association lesfillesdecamille@gmail.com ou auprès de Patricia Ghilardi au 06.29.86.30.40


Sources : documentaire "Camille et ses filles" de Christine Salavert - Grizet suivi d'un débat avec Eliane, Michèle, Mireille et Patricia le 12 mai 2025 à Saint Aubin de Médoc + l'association "Les Filles de Camille" présidée par Patricia Ghilardi

Photos : P. Ghilardi et JM. Lambert





20 mai 2025

Pour venir au monde...

Hier soir une adhérente, Geneviève, nous a remis un joli texte à méditer sur nos origines. Bien que le texte soit disponible sur de nombreux sites internet, son auteur n'est jamais mentionné. Si vous vous reconnaissez, n'hésitez pas à nous contacter afin que nous puissions ajouter votre nom. Voici le texte :

Pour venir au monde, il nous faut : 2 parents 4 grands - parents 8 arrières - grands - parents 16 arrière - arrière - grands - parents 32 trisaïeux 64 quadrisaïeux 128 pentasaïeux 256 hexasaïeux 512 heptasaïeux 1024 octosaïeux 2048 enneasaïeux.

En seulement 11 générations, 4094 ancêtres ont été nécessaires - tout cela en environ 300 ans avant votre naissance ou la mienne.

Prenons un moment pour réfléchir... d'où venaient - ils ? Combien de batailles ont - ils livrées ? Combien de faim ont - ils endurée ? Combien de guerres ont - ils traversées ? Combien d'épreuves nos ancêtres ont - ils surmontées ?

En contrepartie, combien d'amour, de force, de joie et d'encouragement nous ont - ils transmis ?

Combien de leur volonté de survivre chacun d'eux nous a - t - il laissée, nous permettant d'être en vie aujourd'hui ?

Nous n'existons que grâce à tout ce qu'ils ont traversé.

14 mai 2025

Résistance - La tragédie de la ferme de Richemont

Nous sommes en juillet 1944, à quelques kilomètres au sud-ouest de Saucats dans une ferme abandonnée : la ferme de Richemont. Depuis quelques semaines, un groupe d'une vingtaine de jeunes gens s'y retrouvent régulièrement et s'entraînent afin de se préparer à soutenir la résistance.

Cette ferme a été choisie en juin 1944, car isolée et abandonnée, elle est située loin des axes routiers, en plein milieu d'une forêt de pins et seul un chemin étroit en permet l’accès. De plus, elle est suffisamment grande pour y accueillir le groupe de jeunes gens.

Ce sont des jeunes hommes âgés entre 17 et 23 ans  qui sont pour la plupart élèves au lycée Montaigne à Bordeaux. Ils se préparent à intégrer Saint-Cyr, ou l’École nationale de la France d'outre Mer ou encore Médecine. Un groupe de trois tirailleurs marocains les a également rejoint. 

Ils s'entraînent tous avec une rigueur militaire : maniement des mitraillettes, tours de garde, quelques opérations de sabotage et surtout en ce mois de juillet, ils attendent le parachutage d'armes. C'est un message de la BBC qui doit les prévenir : "la panthère est enrhumée" puis "le coucou chante en mai". 

C'est le lieutenant François Mossé qui instruit ces jeunes ; il a l'expérience d'années de résistance dans le Vercors. Avec son cousin Jacques Glotz et avec l'aide du bordelais Jean Dietlin, ce petit groupe a pu être formé vers avril / mai 1944.

Toutefois, l'imprudence de l'un des leurs, André Hosteins, fait qu'ils sont dénoncés.

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Au matin du 14 juillet, vers 7h00, deux autocars traversent Saucats et se rendent en direction de Saint-Magne ; l'un transporte des miliciens, l'autre des Allemands.

Le débarquement, qui a eu lieu le 6 juin, a fait grandir l'espoir de la victoire proche. Ce matin-là, les résistants se sont levés plus tard, ils ont hissé le drapeau français pour célébrer le 14 juillet et vaquent à leurs occupations quotidiennes. Sur les 24 personnes qui composent le groupe, ils ne sont que 15 à la ferme. Ils sont peu armés : douze mitraillettes avec deux chargeurs pour chacune et une caisse de grenades car ils attendent le parachutage d'armes

Vers 8h00, Philippe Béguerie part chercher de l'eau au puits tout proche. Des bruits inhabituels résonnent dans le bois : craquements, bruits de branches.... quand la première rafale de tirs se fait entendre, il n'y a plus de doute possible. 

Rien ne les a préparé à ce qu'il va leur arriver.

A l'intérieur de la ferme, François Mossé, le résistant confirmé qui les dirige, comprend ce qui se passe mais est l'un des premiers à se faire tuer. Pris en étau, par une cinquantaine de miliciens par l'Ouest et une soixantaine d'Allemands par l'Est, les jeunes gens se défendent avec héroïsme jusqu'à 11h00 environ. Les assaillants font alors venir un canon de 105, situé non loin de là. Les jeunes gens, sachant ce qui allaient leur arriver, tentent alors une sortie frontale et sont fauchés sous les balles ennemies.


La Ferme après le massacre 
  

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 Les blessés sont abattus sur place et dépouillés de leurs objets de valeur puis, l'ordre est donné aux habitants de Saucats de les enfouir dans une fosse commune, en dehors du cimetière.  Mais, le maire et les habitants n'obéissent pas à cette demande choquante et décident d'offrir une sépulture décente aux malheureux, à proximité de la ferme calcinée. 

L'inhumation avec les habitants de Saucats
L'inhumation avec les habitants de Saucats
 
Les tombes et les cercueils

Les jeunes gens n'avaient rien sur eux qui puisse permettre de les identifier afin qu’aucune représailles ne puisse être faite envers leur famille. Parmi les décombres, on retrouvera un livre de cours avec la devise d'Henri de Bournazel :

"Mon âme est à Dieu, mon corps à la France, mon honneur à moi"

Un  jeune qui venait de Bordeaux, Jean-Pierre Bouron et qui se rendait à la ferme est capturé par les Allemands, bien qu'il n'ait pas combattu aux côté de ses camarades, il sera emmené au camp de Souge, puis torturé et fusillé. Un jeune charbonnier italien, René Moretto qui se trouvait à proximité par hasard, est également arrêté.

De ce massacre, trois survivront :  Philippe Béguerie, Driss Ben Milou et Miliani Ben Mekki, tous deux tirailleurs. 

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Les jeunes tombés ce jour-là à la ferme :

  • ANÈRE Lucien (Lulu) - né le 12 mars 1924 à Bordeaux, tué à 20 ans. Il avait été reçu à l'école nationale de la France d'outre-mer.
  • BRUNEAU Jean-Claude (Chérubin) - né le 14 février 1925 à Bordeaux, tué à 19 ans. Il avait réussi le concours de médecine et souhaitait devenir chirurgien.
  • CÉLÉRIER Guy - né le 29 janvier 1927 à Bordeaux, tué à 17 ans. Son père a disparu, tombé au combat et sa mère, engagée dans la Croix-Rouge, sera arrêtée et enfermée au fort du Hâ.
  • DIETLIN Daniel (Dany) - né le 25 décembre 1925 à Conakry en Guinée, tué à 19 ans. Il avait été reçu à l'école nationale de la France d'outre-mer. Il était le frère cadet de Jean Dietlin.
  • GLOTZ Jacques (Rivière) - né le 10 février 1923 à Paris, tué à 21 ans. Dès 1940, il s'engage dans des activités de résistance à Grenoble et Lyon ; il arrive à Bordeaux avec son cousin François Mossé.
  • HUAULT Christian - né le 4 mai 1922 à Villaines-les-Rochers en Touraine, tué à 22 ans. Il est appelé par l'organisation Todt, et en sera déserteur et condamné à mort par contumace.
  • HURTEAU Roger (Pacha) - né le 2 septembre 1923 à Alep en Syrie, tué à à 20 ans. Dès 1941, il travaille chez un constructeur de bateau à Lormont et aide la résistance en fournissant des informations. Il connait bien Anère et Rouin.
  • MOSSÉ François (Noël ou Denis) - né 14 novembre 1921 à Paris (8e), tué à 22 ans. Il était étudiant en Droit et Sciences Politiques à Lyon. Vaillant résistant de la première heure, il recruta et organisa le maquis de Saucats. 
  • PICON Michel (d'Harcourt) - né le 15 janvier 1924 à Mayence en Allemagne, tué à la ferme à 20 ans. Il souhaite avoir une carrière militaire comme son père et souhaite intégrer Saint-Cyr.
  • ROUIN Jacques (Dunablad ou toubib)  - né le 13 juin 1922, tué à 22 ans. Il fait ses études à Montaigne et souhaite intégrer Santé Navale. Il sera achevé près de la ferme alors qu'il était en train de panser Huault et Taillefer.
  • SABATÉ Roger (Corbin) - né le 28 juin 1925 à Masparraute au Pays Basque, tué à 19 ans. Il avait réussi le concours d'entrée à Saint-Cyr.
  • TAILLEFER André (Rouquin) - né le 5 août 1923 à Bordeaux, tué à 20 ans.  Il effectue diverses tâches pour des commerces bordelais afin d'échapper au STO. Malgré tout, l'organisation Todt le requière mais il suivra Huault à Saucats. 
Ceux fusillés au Camp de Souge :
  • BOURON Jean-Pierre (Bougie) - né le 1er novembre 1925 à Saint-Nazaire, arrêté le 14 juillet, amené au Fort du Hâ puis fusillé au Camp de Souge le 1er août 1944 à 18 ans. Il sera admissible à Saint-Cyr, il voulait consacrer sa vie au service de la France.  
  • MORETTO René -  né le 3 juillet 1923 à Concordia en Italie, arrêté le 14 juillet, amené au Fort du Hâ puis fusillé au Camp de Souge le 1er août 1944 à 21 ans. Comme il se trouve à proximité de la ferme ce jour-là, il est arrêté en même temps que Bouron et connaît le même sort funeste alors qu'il n'appartenait pas au groupe de résistants.

Les survivants :

  • Abdah-Allah - prisonnier échappé, il avait rejoint le groupe avec Driss. Ce jour-là il était avec Bourdon.
  • BÉGUERIE Philippe - né le 2 décembre 1925 à Bordeaux et décédé le 3 mai 2017 à Paris (14e) à 91 ans. Pendant l'assaut de la ferme, il réussit à s'enfuir et rejoint le maquis de l'Armagnac. Après la guerre, il devient prêtre chez les spiritains. Il a réuni ses souvenirs de ce jour funeste dans un ouvrage intitulé "Le combat de Saucats". 
  • BEN MEKKI Miliani - ce jour-là, n'ayant pas d'arme pour se défendre, il réussit à s'enfuir. Personne ne sait ce qu'il est devenu.
  • BEN MILOU Driss - il est sergent d'une unité de tirailleur marocain, fait prisonnier puis s'évade d'un camp de prisonnier. Il rejoint le groupe avec Abdah-Allah. Ce jour-là, dès qu'il entend les bruits suspects, il se dirige dans leur direction. Personne ne sait ce qu'il est devenu.
  • BOURDON Pierre (Bâton) - il habitait rue Notre Dame à Bordeaux. Ce jour-là,  il était en reconnaissance près de Langon avec Abdah-Allah.  
  • CHANRION Henri (Toto) - il travaille au chantier Dupuy à Douence. Ce jour-là, il faisait la liaison avec la résistance de Bordeaux. 
  • DIETLIN Jean (Eric) - né le 13 juillet 1923 à Conakry en Guinée, frère ainé de Daniel Dietlin. Il a à son actif de nombreux actes de résistance et de renseignement. Il intégrera Saint-Cyr et aura une carrière militaire. Ce jour-là, il fêtait son anniversaire avec sa mère.
  • HOSTEINS André (Dédé) -  né le 20 février 1926 à Bordeaux. Il va faire preuve d'imprudence et va révéler, sous la torture, le lieu où sont réunis ses camarades. Il assistera au massacre, puis sera détenu au Fort du Hâ et déporté. Il sera ensuite jugé pour trahison et décédera le 3 novembre 1973 à Bordeaux à l'âge de 47 ans.
  • RICOU Pierre (Gâteux) - né le 7 novembre 1924 à Talence. Il se prépare au concours à l'école nationale de la France d'Outre-Mer. Ce jour-là, il était parti chercher de la nourriture, quand il reviendra dans la nuit, il découvrira les corps de ses camarades et les veillera toute la nuit. Il continuera dans la résistance puis intégrera l'école nationale de la France d'Outre-Mer. Il reviendra de nombreuses fois au mémorial. Il décédera le 30 novembre 2020 à l'âge de 96 ans. 
  • ...X... (Ernest) - Ce jour-là, il était parti récupérer une voiture du côté de Soulac.

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En avril 1945, un hommage leur est rendu à la Faculté des lettres de Bordeaux ainsi qu'à la cathédrale Saint-André. Leurs corps sont rapatriés à Bordeaux lors de cette cérémonie. Il est décidé de construire un monument à la gloire de ces jeunes tombés sous la barbarie nazie, et à la gloire de l'ensemble des martyrs de la résistance du Sud-Ouest.


 

Le monument est construit sur le lieu du drame car, de la ferme, il ne reste rien : il s'agit d'un obélisque de 35 mètres de hauteur nommé "Le Signal". Sur les quatre faces, quatre sculptures représentant la foi, le sacrifice, le courage, la victoire, ont été réalisées spécialement afin de rendre hommage aux résistants tombés sous les coups de la barbarie. 

Tous les ans, le 14 juillet, leur mémoire est commémorée au Lycée Montaigne à Bordeaux.

 

La plaque commémorative cours Victor Hugo à Bordeaux

Ressources :

 

25 ans de Généalogie 33