22 septembre 2025

Visite de Bordeaux "coquin"

 Le mardi 9 septembre, les membres et les amis de Généalogie33 ont eu l'occasion de visiter Bordeaux à travers ses histoires coquines avec un fameux guide bordelais : Hubert.

 La vie tumultueuse de Thérésa

Nous commençons notre visite au pied de la célèbre colonne des Girondins, sous les arbres de la place des Quinconces, où nous découvrons la vie mouvementée de Thérésa CABARRUS

 

La colonne aux Girondins et Thérésa Cabarrus (Wikipédia pour la peinture)

Thérésa Cabarrus (sa généalogie ici) nait près de Madrid en 1773. Son père François Cabarrus, est un aristocrate français dont la famille a fait fortune grâce au commerce triangulaire.

Thérésa épouse en première noce Monsieur de Fontenay, conseiller au Parlement de Paris, puis, divorce peu de temps après car la Révolution a donné ce droit aux femmes. Elle quitte ensuite Paris pour Bordeaux où elle soutien les Girondins. Mais en décembre 1793, elle est arrêté et conduite en prison au fort du Hâ. Sa grande beauté va la sauver de la prison : le commissaire politique Tallien, tombe sous son charme, la libère et fait d'elle sa maitresse. Elle met alors en place un "négoce"  particulier : des familles de prisonniers font appel à ses services (payants) pour qu'elle intervienne auprès de son amant, ainsi la guillotine fonctionnera de manière moins sévère à Bordeaux... On l'appellera "Notre Dame du Bon Secours".

Cependant, à Paris, cette liaison et le "faible" nombre de guillotinés bordelais font scandale. Le couple se rend à Paris pour se justifier, mais les aristocrates étant tous suspects en cette période de la Terreur : Thérésa est donc à nouveau emprisonnée. De sa geôle, elle écrit ces mots à son amant : "Je meurs d'être aimé par un lâche". Tallien déterminé à la sauver, s'oppose alors vigoureusement à Saint-Just lors d'une prise de parole au Parlement ; cette action sera déterminante et causera la perte de Robespierre. Thérésa est sauvée ! 

Vers 1805, elle quitte Tallien et peu après, le général Napoléon Bonaparte la courtise mais elle refusera ses avances. Elle se mariera ensuite avec un riche et vieux héritier qui lui laissera sa fortune. Elle finira ses jours en Belgique. 

Les balcons

 Spécificité Bordelaise, des dispositifs métalliques en clé de sol vont servir à séparer les balcons contigus d'un immeuble afin d'empêcher le passage entre appartements. Appelé aussi "garde-cocu" ces dispositifs sont mis en place afin de préserver l’intimité et plus particulièrement celle des femmes...

Le Grand Théâtre

 Construit à la fin du XVIIIe siècle, le Grand Théâtre devient rapidement un lieu de rencontre entre hommes fortunés et femmes artistes ou non. 

 

Le Grand Théâtre de Bordeaux

Les femmes artistes sont très souvent les maitresses des grands hommes, telle Hortense Schneider grande vedette du second Empire née à Bordeaux qui devient la muse d'Offenbach. Sa réputation et sa célébrité la feront côtoyer notamment Napoléon III.  

Les jeunes femmes, spectatrices, se rendent au théâtre pour rencontrer des jeunes hommes ; contrairement aux hommes, un siège numéroté leur est attribué, ce qui facilite les retrouvailles d'un spectacle à l'autre... 

L'homosexualité

Au XIXe siècle l'homosexualité - notamment - masculine est  très mal perçue par la société ; elle est considérée comme une déviance voire un fléau. Bien que la Révolution (en 1791) ait dépénalisé ces relations, la morale bourgeoise de l'époque valorise la famille traditionnelle et la reproduction. L'homosexualité est à nouveau pénalisé durant la Seconde Guerre Mondiale, il faudra ensuite patienter jusqu'en 1982 pour que les droits des personnes homosexuelles soient à nouveau reconnus. 

 

Passage piéton arc en ciel

A Bordeaux, les passages piétons "Arc-en-ciel" sont le symbole du soutien de la Ville à la communauté homosexuelle. Le premier a été mis en place en 2019, cours du Chapeau Rouge.

 Les peintres 

 Au XIXe siècle, les prostituées sont les seules femmes à poser nues pour les peintres et ce pour diverses raisons dont notamment leur tarif attractif qui les rend abordables. Courbet, Manet, Toulouse-Lautrec, Picasso et d'autres reproduisent les scènes de la vie quotidienne parfois suggestives (les bals populaires, les bords de Seine avec les prostituées, les maisons closes...) ou mettent en scène des femmes dénudées. 

  La place de la Bourse

La célèbre fontaine de la place de la Bourse représente les Trois Grâces de la mythologie Grecque :

  • Aglaé, la Beauté,
  • Euphrosyne, la Joie
  • Thalie, l'Abondance

Il était de coutume qu'un prête bénissent les statues lors de leur présentation officielle. Or, en 1869, les Trois Grâces n'ont pas eu la chance de recevoir cette bénédiction car le prêtre a refusé en prétextant que les hommes de Dieu "baptisent les femmes saintes et pas les seins des femmes".

 

Place de la Bourse


 Le Duc de Richelieu (1696-1788) est un personnage illustre de Bordeaux. Au XVIIIe siècle, il imposa l'autorité du Roi et contribua activement au développement de la ville. Sévère, puissant, célèbre et bel homme il fut désiré par beaucoup de femmes qui lui écrivaient passionnément. Grand ami de Louis XV, le Duc réussit à introduire le vin de Bordeaux auprès du Roi en prétendant que celui-ci avait des vertus aphrodisiaques. Les viticulteurs bordelais lui doivent beaucoup.

 

 La prostitution 

Au XIXe siècle, la prostitution est réglementée et largement répandue.  La place Saint-Pierre est l'un des lieux de prostitution à Bordeaux tout comme le quartier Mériadeck. La prostitution légale s'opère dans les maisons closes ou "maison de tolérance" ; les femmes ont des cartes de travail et un médecin les ausculte régulièrement. Dans la rue, c'est la prostitution illégale. 

Place Saint-Pierre

 Les filles travaillant dans les maisons closes sont recrutées par une personne appelée placeur (ou placeuse) dans les bals de village, dans les pensions, voire dans les hôpitaux. Les filles passent un entretien avec un commissaire qui leur délivre une autorisation d'exercer, puis une visite médicale et enfin elles sont installées dans une maison close où se met en place un système très contraignant de dettes. La nourriture, les soins, les parfums, les produits d'hygiène sont payants et très chers afin de maintenir les filles dans une situation de précarité financière. 

Dans les années 1870, on dénombre environ 80 maisons closes, dans le quartier de Mériadeck.

 Tout un vocabulaire spécifique se crée :

  • l'ânesse :  la cheffe à la tête de la maison close
  • l'entolleuse : celle qui vole des clients
  • l'allumeuse : la prostituée qui sort en même temps que les employés de la ville qui allument les réverbères... 
  • les grisettes : les femmes pauvres ayant des vêtements gris 

 Les filles sont soumises à des visites médicales régulières car la grande peur de ce siècle c'est d'attraper la syphilis. Quand elles sont malades, l'hôpital Saint-André les accueille, ce qui permet aux étudiants en médecine de s'exercer... Elles attrapent donc plus de maladies en allant à l'hôpital.

La plus vieille pharmacie de Bordeaux
 

Les prostituées font régulièrement des séjours en prison car elles doivent suivre de nombreuses règles et cela permet également de les maintenir soumises. Elles y  restent quelques jours ; les conditions de détentions sont très dures : pas d'eau, pas de chauffage. C'est actuellement le musée des Arts Déco qui servait de lieux de détention spécifique aux prostituées et aux marins. 

Le musée des Arts Déco

C'est en 1946 que les maisons closes sont interdites en France. Puis la prostitution dans la rue sera également illégale. Mais en 2013, on découvre qu'une certaine Mme Agnès proposait des filles à des personnes plutôt connues et à des tarifs très élevés. Elle sera jugé pour proxénétisme et écopera d'une peine d'un an de prison ; aucun nom de ses clients ne sera dévoilé...

  


 Un grand merci à notre guide Hubert pour cette visite instructive !

 

Photos : Généalogie 33

 

Visite de Bordeaux "coquin"